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Amies pour la vie

{{ config.mag.article.published }} 8 février 2018

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Boule à zéro pour leur amie malade, elles se sont mises en ligne. Pierre Le Coz* revient sur cette « séquence émotion ».

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Les faits

En février 2014, des amies de la Sud-Africaine Gerdi McKenna, atteinte d’un cancer du sein, lui ont fait la surprise de se raser la tête en signe de solidarité. Elles ont fait don de leurs cheveux à l’association Cansa, qui soutient la recherche contre le cancer et ont filmé leur séance chez le coiffeur ainsi que leurs retrouvailles.Diffusé sur les réseaux sociaux, le clip a suscité une avalanche de commentaires émus, louant le « courage », l’« amour », l’« indéfectible soutien » de ces femmes.

Le point de vue du philosophe

« Cette initiative est portée par la générosité de femmes qui souhaitent apporter leur solidarité, signifier leur attachement à une amie malade. C’est donc un acte empreint de bonne volonté sur lequel il n’est pas possible de porter de jugement de valeur dépréciatif. En regardant ce clip, on peut d’ailleurs se laisser attendrir par cet élan du cœur. Mais, dans le même temps, on ne peut s’empêcher de ressentir un certain malaise, une crainte. Celle que la personne vis-à-vis de laquelle ces femmes entendaient être bienfaisantes n’ait pas été consultée.

En cancérologie, pourtant, un grand progrès a été réalisé ces dernières années dans le domaine de la relation médecin-malade : on écoute davantage les patients. On leur demande plus souvent ce qu’ils voudraient. On essaie de ne pas leur imposer leur bien. Là, on a précisément l’impression d’une bienfaisance imposée : on va faire une surprise à notre amie, mais sans se demander si ce “cadeau” pourrait l’embarrasser, la gêner, voire la culpabiliser. Il me semble qu’avant de s’engager dans une initiative spectaculaire diffusée sur Internet, on aurait dû se demander si elle correspondait vraiment à ce dont la bénéficiaire avait besoin. Peut-être cette femme aurait-elle eu envie de plus de présence, ou qu’on lui propose de partir avec elle quelques jours… Ne pas l’interroger, c’était lui témoigner une fausse bienveillance pouvant s’avérer étouffante, envahissante.

La vraie générosité ne peut selon moi se passer du respect, qui consiste plutôt à s’effacer soi-même, à ne pas se mettre en avant devant un photographe ou un écran. La pierre de touche du don est à mon sens la discrétion. Quand on commence à théâtraliser sa bienfaisance, on perd un peu de la pureté, de la nature profonde du don, qui est avant tout un acte individuel.Or dans ce clip, et c’est un deuxième problème, les amies non plus ne semblent pas avoir été interrogées. Elles n’existent pas en tant qu’individus. Pourtant, elles ont toutes, forcément, des histoires personnelles. Sans doute certaines ont-elles des enfants, un conjoint, un lieu de travail ? Vont-elles se montrer de longs mois tête nue, le temps que leurs cheveux repoussent ? Quel impact psychologique leur décision aura-t-elle sur leurs proches ? Si l’une d’elles traverse par exemple une crise dans son couple, comment va-telle expliquer son geste à son conjoint ? Quoi dire à des enfants qui, en voyant le crâne subitement chauve de leur mère, peuvent redouter qu’elle soit malade ? Cette initiative est susceptible de créer une concurrence entre l’amitié que ces femmes vouent à leur proche malade et l’amour dont elles sont censées entourer leur famille. “Et alors nous, peuvent-elles s’entendre dire, on ne compte pas pour toi ? As-tu pensé à nous ?”

Les histoires singulières sont ici gommées. Ces femmes sont d’une certaine manière réduites à des “toutes pareilles”, “toutes amies”. Et du coup, en bonne bande de copines, elles s’affichent souriantes, malgré le côté symboliquement très fort de leur acte. Le message, dérangeant là encore, semble être : pour montrer sa générosité, son altruisme, rien n’est mieux que de se raser les cheveux.

Évidemment, il s’agit là d’une fausse fusion : la malade ne s’est pas coupé les cheveux de son plein gré. Elle a le cancer, et ses amies non. Elles ont beau faire, elles ne peuvent pas se mettre à sa place. Et la patiente peut même trouver très douloureuse l’apparente désinvolture avec laquelle ses 11 copines se sont défaites d’une chevelure qu’elle-même a eu tant de mal à voir tomber. À travers ce clip, on nous laisse donc entendre que faire le bien d’une personne, ça peut être court-circuiter son point de vue et accomplir collectivement un geste semi-sacrificiel, qui plus est dans la bonne humeur… »

 

* Philosophe, ancien vice-président du Comité national d’éthique, directeur du département des sciences humaines de la Faculté de médecine de Marseille, auteur du Gouvernement des émotions (Albin Michel).


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Béatrice Lorant

Ancienne rédactrice en chef de Rose magazine

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