En 2013, j’ai eu un premier cancer du sein. J’avais 28 ans. A cette époque, clairement je n’étais pas prête à ce qu’on me le retire. J’ai pu le conserver mais on m’a ôté la plaque aréolo-mamelonnaire. Puis, avec mon compagnon, nous avons eu un bébé que j’ai allaité à mon autre sein. C’est celui-là qui a été touché par une tumeur en 2022. Cette fois, impossible d’échapper à l’ablation. Comme je suis porteuse d’une mutation, autant retirer les 2 pour ne plus avoir à vivre avec une bombe à retardement dans ma poitrine.
Une seule opération et c’était fini…
Et après ? Me faire reconstruire en volume ? J’ai fait des recherches : dans tous les cas, cela signifiait subir plusieurs opérations. La pose d’implants en elle-même nécessitait au moins 3 interventions supplémentaires. Cela m’a paru long, fastidieux, invasif, avec en plus un risque de rejet. Et pour un résultat que je trouvais disgracieux.
J’ai découvert aussi qu’il existait la reconstruction à plat. Je ne trouvais pas le résultat tellement plus joli mais cette option offrait un avantage majeur : c’était fini en une seule opération ! Qu’en disaient les femmes qui l’avaient fait ? J’ai passé des nuits entières sur les réseaux sociaux à rechercher des témoignages sur le sujet, et j’ai trouvé le site Les EXTRA-plates. J’ai contacté sa fondatrice, Carine Vincent, et j’ai pu échanger avec elle.
Non, on n’est pas un monstre sans sein
Grâce à l’association Jeune et Rose, j’ai aussi rencontré une femme d’à peu près le même âge que moi, qui était tellement à l’aise avec son corps que je n’ai pas remarqué tout de suite son buste plat ! Cela m’a rassurée : non, on n’est pas un monstre sans sein ! J’en ai aussi discuté avec mon conjoint qui m’a simplement dit « c’est ton corps, et c’est ta vie. Tout ce que je peux dire c’est que je préfère t’avoir sans seins que ne pas t’avoir du tout ».
Mon cheminement a duré en tout 9 mois… le temps d’une gestation. Durant cette période, j’ai continué à questionner, parler avec d’autres femmes sur leur rapport à leur poitrine et à leur corps. J’ai ainsi découvert que beaucoup sont insatisfaites de ce qu’elles ont. On est toutes tellement conditionnées par les canons inatteignables de la féminité véhiculés par la société, les médias !
Ma quête m’a aidée à déconstruire tout ça. Cela m’a donné l’élan de fonder l’association Par tous les seins, afin de continuer à aborder, entre femmes, le sujet du corps et plus particulièrement de la poitrine. C’est donc en conscience, et peut-être aussi avec un petit côté militant, que j’ai enfin fait mon choix.
INFO +
En 2024, Caroline Schang a fondé l’association Par tous les seins, destinée à favoriser les échanges entre femmes sur leur rapport à leur poitrine et le regard qu’y porte la société.
+ d’infos sur instagram : @caroline.schang ou @par_tous_les_seins
La reconstruction à plat a été un parcours initiatique
Mais il a encore fallu faire face à l’incompréhension de certains soignants qui me renvoyaient à cette question blessante, indélicate : « Vous ne voulez pas être reconstruite ? ». Et chaque fois, je répondais : « Si, mais à plat ! ». Une fois l’opération réalisée, accepter mon nouveau corps a été bien plus rapide et simple pour mon compagnon que pour moi. Dans l’intimité, dans son regard, rien n’avait changé. C’est moi qui ai mis du temps à être naturelle face à lui.
Aujourd’hui, mon corps sans poitrine, c’est ma coquetterie. Passer par la reconstruction à plat a été un parcours initiatique qui a fait de moi une femme plus affirmée. Avec mes cheveux courts, je joue avec une androgynie dans laquelle je m’étais toujours plus ou moins inscrite et que, maintenant, j’assume complètement.
À LIRE : Retrouvez tous les épisodes de notre série « J’ai choisi la reconstruction à plat »
Propos recueillis par Sandrine Mouchet