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Mon PAC : je t’aime, moi non plus

{{ config.mag.article.published }} 30 avril 2015

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Honni ou chéri, ce petit boîtier sous-cutané ne laisse aucune de vous indifférente. La preuve...

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A comme Ami

Laura « collectionne » les PAC : « Quand j’avais 4 ans, la petite boîte magique était déjà mon amie. J’entends encore le « toc toc » que faisait ma maman pour lui dire bonjour. C’était notre petit rituel. Dix ans plus tard, le deuxième boîtier m’a laissé une marque de guerre supplémentaire et, à 24 ans, le troisième est une grande fierté. Quand j’ai un petit coup de mou, il me suffit de le toucher pour me rappeler le chemin parcouru : je suis en rémission et en vie. »

B comme Blessure

Quand certaines ont une relation quasi sentimentale avec « leur » PAC, d’autres, comme Murielle, ont du mal à l’intégrer : « J’ai développé des peurs. Craignant que mon chat ne me saute dessus, je me recroqueville parfois au point de me contracter et de souffrir des cervicales. Je n’arrive pas non plus à passer la main dessus quand je fais ma toilette ! » Blessure psychologique, blessure physique, le PAC est, pour beaucoup, le symbole du cancer. « Signe de mon appartenance au monde du cancer, il me distingue », confie Valérie.

C comme Coquillage

« Est-ce que je me séparerais de ma peau ? interroge Danielle. Non, bien sûr. Ce boîtier fait partie de mon histoire intime. Il veille en sentinelle au creux de mon épaule depuis plus de cinq ans. » Objet de superstition, il est également inséparable de Fabienne, dont les traitements sont terminés depuis un an : « Il fait partie de moi. Il rappelle que je me suis battue contre la maladie et que je suis vivante. »

Même chose pour Mylène, qui sent que son histoire avec ce boîtier, « cramponné à [elle] comme un coquillage à son rocher », n’est pas terminée. Son souhait ? Que cela dure, « car cela signifie que l’on peut encore [la] soigner ». « L’ablation du PAC pose la question du deuil, de l’abandon, explique le Dr Georges-Michel Reich, psychiatre et responsable de l’équipe de psycho-oncologie du centre Oscar-Lambret, à Lille. Certaines patientes, craignant de s’en séparer, souffrent du syndrome de Stockholm. »

D comme Doudou

Mon petit embout, mon bijou, doudou, lapin, joli tambour…Quand la pensée magique entre en action, « la capacité créative des patientes est sans limite », note Yolande Arnault, psychologue clinicienne à l’IPC à Marseille. Certaines, comme Claire, y voient une « jolie broderie » quand d’autres auraient aimé qu’il soit illustré, représentant une fleur ou, plus étrange, le corps d’une souris (plutôt celle des ordinateurs, sans doute) ! Une fois intégré, l’objet est bichonné, caressé, massé… voire, comme pour Céline, perchée sur des stilettos dans une robe au décolleté ravageur, arboré avec une pointe de fierté.

G comme GPS

« Comme un GPS, le PAC indique en permanence la maladie dans le corps de la patiente », souligne le Dr Reich. Certaines femmes sont capables de le positiver, d’autres moins. Pour Valérie, « il est la preuve qu’[elle est] vraiment malade et qu’[elle n’est] plus comme les autres, les bien portants »… Un signe extérieur de la maladie : « C’est grâce à lui que l’on me soigne, que l’on me suit et que l’on me surveille. »

« L’ablation du PAC pose la question du deuil, de l’abandon »

H comme Haine

Élodie se plaint de le sentir en permanence : « Il me gêne, m’insupporte. Je le hais, il m’empêche de dormir sur le ventre, de m’habiller comme il me plairait. » Véronique reconnaît que ce qu’elle a « le plus mal vécu, ce n’est pas d’avoir un cancer, mais d’avoir ce corps étranger ». « Certaines femmes focalisent sur le PAC, vécu comme un mécanisme de défense psychique de déplacement, observe le Dr Reich. Tout le stress, tous les stimuli anxiogènes sont ciblés sur lui et non sur le cancer. »

I comme Intrus

« Bosse, bouchon de bouteille, intrus, corps étranger, balafre… », le PAC est aussi l’ennemi, l’objet à abattre. La première fois que Manon l’a découvert dans le miroir, elle s’est trouvée mal. « Il est moche », enrage Cathy, toute menue, qui du coup ne voit que lui, comme le nez au milieu de la figure. « Tout rouge, il me démange, m’irrite. Parfois, je me cogne dessus et il vire au bleu. » « Comme la perte d’un sein ou des cheveux, il peut mettre la féminité à mal et constituer un stigmate supplémentaire de la maladie et des traitements », constate Yolande Arnault. Les femmes tentent alors de le dissimuler sous les vêtements, une bretelle de soutien-gorge, un patch rigolo.

O comme Organe

La vie de Clara a changé depuis la pose de son PAC, à 24 ans. Trois ans plus tard, victime d’une récidive de cancer du sein, elle ne s’imagine plus sans cet « organe naturel qui a d’emblée symbolisé le début des soins ». « Cette petite bosse, je l’ai dans la peau depuis quatre ans, confie à son tour Valérie. Elle me rappelle pourquoi je me bats. Je l’ai adoptée. » Pour Fabienne aussi, le Pac est fonctionnel, rassurant, essentiel. Elle n’aurait pu s’en passer, refusant qu’on la pique ailleurs lors des prises de sang et de l’antibiothérapie. « C’était insupportable sans lui. »

« Les patientes doivent soudain cohabiter avec un corps étranger qui s’incruste dans leur intimité »

P comme Poids

Érigé au rang de sauveur, le PAC est aussi le mal absolu qu’il faut retirer au plus vite « pour tourner la page », tranche Christine. Idem pour Véronique, qui souhaite une « dépose immédiate après la dernière chimio pour ne pas porter le poids de la maladie ». « Libérée un an après la pose », Isabelle se sent « plus légère, prête à aller de l’avant ». « Sorte de catharsis, le retrait du PAC entraîne une libération, mais à condition que la patiente ait déjà commencé un travail psychique de deuil par rapport au cancer », observe le Dr Reich. Témoin Jocelyne. Quand on lui a enlevé le boîtier, elle a pleuré à chaudes larmes. « Je venais de réaliser que j’avais eu de lourds traitements, et un cancer. Drôle de sensation. »

R comme Rite

« Quand on vous annonce un cancer, c’est très difficile, mais ça reste un peu abstrait, confie Clara. En revanche, lorsque l’on vous injecte la première chimio à travers ce boîtier, vous entrez vraiment dans le monde du cancer. » Un passage souvent vécu comme une sorte de rite initiatique : « Les patientes doivent soudain cohabiter avec un corps étranger qui s’incruste dans leur intimité, explique le Dr Georges-Michel Reich. Qu’il soit rejeté ou accepté, le PAC s’inscrit dans le psychisme. »

S comme Sauveur

« Il m’a sauvé la vie, reconnaît Caroline : grâce à la chimio d’abord, puis parce que l’on a pu m’alimenter et faire passer d’autres médicaments à travers lui quand j’ai failli perdre la vie. Il était là, m’évitant d’être piquée encore et toujours. Quand on m’a proposé de l’enlever, je n’ai pas voulu, je n’étais pas prête. » Utile, indispensable, vital, c’est un « cadeau » pour Céline, qui remercie son inventeur tous les jours. Hospitalisée cinq jours par mois pour ses chimios, « le produit passant 21 heures sur 24, il [lui] a permis d’éviter des souffrances répétées et inutiles ».


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Céline Dufranc

Journaliste

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