Face aux cancers, osons la vie ! 
Toutes les chimios ne font pas tomber les cheveux, mais pour les femmes à qui cela arrive, cette chute est en général perçue comme une dépossession d’une partie de soi, une perte d’identité, une atteinte à sa féminité. C’est aussi le moment où le cancer devient visible aux yeux des autres. Pas facile à vivre, tout ça ! Le bon moyen pour se faire du bien à la tête ? Agir, et déjà se préparer à la repousse ! Que faire et que faut-il éviter de faire ? Réponses avec la socio-coiffeuse Anne Chanard, intervenante à la Maison RoseUp de Paris.
À quel moment se préparer à la repousse ?
Anne Chanard. Plus tôt on s’y met, plus belle sera la repousse ! Le cuir chevelu, c’est « la maison » des cheveux. Alors, dès qu’on sait qu’on va les perdre, on arrête tout ce qui le fragilise : les brushings, le fer à lisser. On favorise les shampoings très doux, car avant même que les cheveux commencent à tomber – en général entre le 14e et le 21e jour suivant la première séance de chimio – ils se fragilisent et deviennent cassants, secs, ternes. Le cuir chevelu picote ou gratte. Autant de signes précurseurs de la chute. Je conseille dès ce moment déjà de raccourcir les cheveux, en réalisant, au minimum, une coupe intermédiaire. Voire de les raser.
S’il n’y avait qu’une règle à suivre, ce serait…
Le maître mot, c’est : hydratation. Le cuir chevelu, c’est de la peau. Alors on le nourrit et le protège au quotidien, avec une crème, un baume, un lait… Le produit que l’on a l’habitude d’appliquer sur son corps conviendra très bien. Quand les gratouillis se manifestent, on n’hésite pas à vaporiser une brume apaisante pour cuir chevelu, ou tout simplement de l’eau thermale…
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Un conseil en plus ?
Pour bien nourrir son cuir chevelu, on peut ajouter à sa routine quotidienne un soin à l’huile végétale. Il en existe aujourd’hui qui combinent plusieurs huiles aux propriétés très intéressantes. On l’applique en bain d’huile une à deux fois par semaine. On laisse poser entre trente minutes et une heure avant de se laver la tête.
Surtout : pas de shampoing ! Trop détergent pour la peau. Pendant toute la période où l’on est en traitement de chimio, il est préférable d’éviter de stimuler la circulation sanguine au niveau du cuir chevelu, laquelle augmente le risque que les agents des produits de la chimio viennent attaquer le bulbe.
Donc on se lave la tête et on fait pénétrer son produit hydratant ou son huile végétale en douceur. Pas de pression avec les doigts, on privilégie les mouvements caressants.
Eau chaude ou eau froide pour se laver la tête ?
Le froid, c’est l’idéal. Il a pour effet de contracter les vaisseaux sanguins, limitant ainsi l’afflux dans le cuir chevelu des agents des produits de la chimio qui affectent les follicules pileux. C’est sur ce principe que fonctionnent les casques réfrigérants. Au contraire, le chaud dilate les vaisseaux, accroissant l’afflux sanguin. On a compris que ce n’est pas souhaitable pour préserver son capital pileux, et ça dessèche la peau. Donc la bonne alternative si l’on ne supporte pas l’eau froide, c’est l’eau tiède ! Et, quand on sèche son crâne, on évite de le frictionner, on le tapote gentiment.
Vaut-il mieux dormir tête nue ?
Ça dépend. On a souvent froid en dormant ainsi. Porter un bonnet peut être plus confortable. C’est alors mieux de le choisir en soie ou en satin. Je conseille aussi ces matières pour les taies d’oreiller si on dort tête nue. On évite ainsi l’effet « tonsure de bébé » dû aux frictions avec les tissus en coton, qui usent les petits cheveux, toujours très fins et mous quand ils commencent à peine à repousser.
Et pour sortir dans la journée ?
Les foulards en soie sont très bien, sinon les choisir en coton très doux. Les bonnets en fibres de bambou sont parfaits pour les cuirs chevelus hypersensibles. Et, si vous sortez le crâne nu, n’oubliez pas d’appliquer une bonne protection solaire en toute saison !
Quel rituel en cas d’alopécie partielle ?
Si on garde très peu de cheveux, on adopte la même routine que pour une alopécie totale. En revanche, pour celles qui présentent une chute diffuse, clairsemée, ou qui conservent des plaques de chevelure par endroits, il faut soigner ces cheveux. Ils sont gorgés de chimio et sont souvent mousseux, cassants, très secs, « comme une vieille moquette », m’a dit récemment une patiente atteinte d’un cancer métastatique. Une formule assez juste ! Il faut les laver avec un shampoing très doux et aux ingrédients les plus naturels possibles, sans paraben ni silicone.
Pour les renforcer et les hydrater, on peut aussi appliquer en masque un mélange de quelques gouttes d’huile de ricin (riche en vitamine E et antioxydante) et d’huile d’amande douce, d’argan ou de coco (toutes très hydratantes). On se masse le cuir chevelu durant cinq minutes, tout doucement, avant de descendre jusqu’aux pointes. On laisse reposer trente minutes avant de rincer. L’huile de ricin étant très grasse et visqueuse, deux rinçages sont souvent nécessaires. Il est préférable de laisser sécher à l’air libre, mais si on souhaite utiliser un sèche-cheveux on choisit la position la plus tiède possible.
À quelle fréquence faire ce masque ?
Une fois par semaine, si on veut. Ou, à la place, on peut tout simplement appliquer une crème de soin sans rinçage, plus pratique et plus rapide ! Encore une fois, l’essentiel est d’utiliser les produits les plus naturels possibles. Et doux. Autre chose utile à savoir : souvent, les femmes qui conservent tout ou partie de leurs cheveux pendant la chimio ont peur de les couper. C’est une erreur. Ces cheveux subissent tout, et s’abîment. De toute façon, ils poussent, donc entretenir la longueur en les coupant régulièrement va aussi les régénérer !
Et pour les alopécies dues à la radiothérapie ?
La perte des cheveux est souvent partielle : elle concerne les zones irradiées. Souvent, les femmes craignent qu’ils ne repoussent jamais. Ce n’est pas certain ! J’ai vu de très belles repousses chez de nombreuses patientes ! Tout dépend de la zone irradiée, de l’intensité des rayons, de la qualité des cheveux au départ… Une chose est sûre : si repousse il y a, elle prendra plus de temps qu’après une chimio. Mais je dis toujours aux femmes de garder espoir, et de continuer à soigner, à hydrater et à masser leur cuir chevelu, pour mettre toutes les chances de leur côté.
