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Emprunter après un cancer : le parcours du combattant

{{ config.mag.article.published }} 23 février 2015

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Assureurs frileux ? Banques allergiques au risque ? Emprunter après la maladie demeure compliqué. Et ce malgré la convention Aeras. Précaire tu es, précaire tu restes.

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Les médecins les ont déclarés guéris. Mais tous n’en sont pas pour autant sortis. Ceux qui tentent de décrocher un banal prêt immobilier – et donc l’assurance prêt bancaire assortie, préalable à toute acceptation d’emprunt et accordée après examen du dossier médical – en savent quelque chose. « Quand le prêt leur est finalement accordé, c’est comme si la société tout entière confirmait leur guérison. Au contraire, un refus les renvoie à la maladie dont ils se croyaient libérés », explique un courtier en assurances spécialisé dans le « risque aggravé de santé ».

Confirmation de Dany, 54 ans : « Lorsque j’ai reçu une réponse négative de cinq assureurs différents, ce fut pire que le jour où on m’a annoncé mon cancer du sein. J’étais anéantie. » Employée depuis trente ans dans un grand groupe industriel, Dany bénéficie pourtant d’un contrat de prévoyance lui garantissant 95 % de son salaire pendant deux ans en cas d’arrêt de travail, ainsi que d’une assurance invalidité couvrant largement le montant du capital qu’elle voulait emprunter pour acheter un appartement – 60 000 euros. Du coup, elle pensait faire partie des « bons clients ». Et n’imaginait pas que son cancer poserait problème. Détecté très tôt, considéré comme de « bon pronostic », il n’avait pas nécessité de chimiothérapie. Enfin, quatre ans s’étaient écoulés depuis le diagnostic et Dany disposait d’un certificat de guérison délivré par son oncologue. Elle était loin d’imaginer qu’elle se retrouverait ainsi « abandonnée au bord de la route ».

Principal reproche : pas de prise en compte des progrès de la médecine dans les pronostics de guérison

Cette histoire illustre l’opposition de deux logiques, l’une humaine et l’autre statistique. D’un côté, une femme pense avoir vaincu la maladie et se projette dans l’avenir. De l’autre, un assureur mesure un risque de « surmortalité » par rapport à une femme du même âge non touchée par le cancer. « Le médecin-conseil de l’assureur évalue un risque statistique, explique le Dr Catherine Tchoreloff, médecin conseil de Munich Ré, premier réassureur* mondial. L’intérêt de l’assureur n’est pas de refuser quelqu’un d’assurable, mais de lui faire payer le prix du sur-risque lié à sa maladie. » « En fonction de sa pathologie, si le taux de survie à un an (après le diagnostic) est de 99 % et plus, cette personne est assurable, précise Yves Couturier, directeur de la clientèle de CNP Assurances. À 98 %, elle ne l’est plus car cela représente un risque de mortalité dix fois supérieur à celui de la population générale. Il faudrait lui appliquer une surprime de 1 000 %. Les assurés refusent au-delà de 300 %. »

Reproche majeur fait aux assureurs : ne pas suffisamment prendre en compte les progrès de la médecine dans les pronostics de guérison d’une pathologie déterminée. Le Dr Philippe Beuzeboc, oncologue à l’Institut Curie, déplore ainsi de voir des jeunes hommes de 25 à 35 ans, guéris d’un cancer du testicule « de bon pronostic », obligés de s’acquitter de surprimes très importantes alors que le risque de rechute est quasi nul. « Toutes les études le prouvent : trois ans après le diagnostic, ils n’ont pas plus de risques de retomber malade que de recevoir une tuile sur la tête. » Pour le Dr Catherine Tchoreloff, il s’agit là d’une  « vieille histoire ». « Je ne dis pas que ce problème n’a jamais existé. Mais, au sein de ma société, et je sais que c’est également le cas chez des concurrents, ces dossiers sont tarifés sans surprime quatre ans après le diagnostic », affirme-t-elle.

La tentation de cacher son cancer

Dany a finalement eu gain de cause et pu acheter son appartement. Elle a fait appel à un courtier spécialisé qui lui a trouvé un contrat d’assurance avec une surprime de 15 % – preuve que, d’une assurance à l’autre, l’appréciation d’un dossier peut varier considérablement. Mais l’expérience lui a laissé un goût amer. « Si c’était à refaire, je ferais une fausse déclaration : je cacherais mon cancer », dit-elle. C’est le conseil que donnent parfois certains cancérologues à leurs patients : si vous avez les moyens d’assurer vos remboursements, ne déclarez pas votre maladie. « Attention, c’est risqué et ça peut entraîner la nullité du contrat, même en cas d’accident ou de maladie autre que la pathologie non déclarée », avertit le Dr Tchoreloff. Car il suffira de lire le dossier médical pour constater la fausse déclaration.

Mais, financièrement, Dany avait les moyens de faire face aux échéances sans solliciter son assurance, ce qui n’est évidemment pas le cas de tous les anciens malades emprunteurs. Pour ceux-là – la majorité –, des dispositifs facilitant l’accès au crédit ont été mis en place. Il y a d’abord eu la convention Belorgey, en 1991, puis la convention Aeras (S’Assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé), signée en 2007 et réactualisée en 2011.

Aeras, nouvelle édition

Est-ce que cela a changé quelque chose ? Oui, répond le Dr Marc Keller, qui représente La Ligue contre le cncer au sein de la commission de suivi Aeras. « Avant 2007, les assureurs laissaient traîner les dossiers ou les renvoyaient avec la mention  » dossier incomplet « , explique-t-il. Du côté des malades, les comportements ont également changé : ils sont plus nombreux à solliciter un prêt. » « Avant, les malades s’autocensuraient. Ils n’essayaient même pas », remarque Philippe Thébault, courtier spécialisé dans le risque aggravé de santé. « Le nombre de dossiers cancer est en augmentation constante », confirme Yves Couturier (CNP Assurances), qui représente les assureurs au sein de la commission de suivi Aeras. Avec quel taux d’acceptation ? Là, les avis divergent.

La moitié des « dossiers cancer » refusés

La Fédération des sociétés d’assurances (FFSA) affirme qu’en 2010, 93,2 % des dossiers avec un risque aggravé de santé ont reçu une proposition d’assurance couvrant au moins le risque de décès, et que 91 % de ces propositions ont été acceptées par les assurés. La FFSA précise que 58 % de ces propositions d’assurance ne comportaient ni surprimes, ni exclusions de garantie. Bien sûr, ce chiffre ne recouvre pas spécifiquement les cas de cancer, mais toutes les maladies graves et invalidantes.

Quid du cancer en particulier ?

« Aujourd’hui, 84 % des dossiers de cancer du sein reçoivent une réponse positive, contre 72 % en 2000, affirme Yves Couturier.Donc, les choses évoluent, contrairement à ce qu’on dit. » Les chiffres de la FFSA laissent Philippe Thébault dubitatif : « mon expérience personnelle, après une quinzaine d’années de pratique, c’est que la moitié des dossiers cancer sont refusés. Et encore, je n’inclus pas dans ce pourcentage les dossiers que je ne présente même pas parce que je sais d’avance qu’ils n’aboutiront pas. » Ces dossiers difficiles, ce sont précisément ceux qui atterrissent sur le bureau du Dr Catherine Tchoreloff (réassureur Munich Ré). Rejetés au premier et au deuxième niveaux prévus par la convention Aeras, ils font l’objet d’un troisième examen par le pool des sept réassureurs qui se partagent le marché.

Trop de demandes « précoces »

Depuis 2002, plus de 47 000 dossiers ont ainsi été examinés par le Bureau commun des assurances collectives (BCAC). Leur nombre est en constante augmentation, d’une année sur l’autre : 7 081 en 2009, 9 022 sur les onze premiers mois de l’année 2011 (soit 9 850 en rythme annuel). « Pour plus d’un tiers, ils concernent des cas de cancer », note le Dr Tchoreloff. Parmi ces dossiers difficiles, elle relève notamment une augmentation des demandes trop « précoces » : « On voit des dossiers de personnes qui sortent tout juste de la maladie. Quand on est trop près de la maladie, on ne peut pas mettre un prix sur le risque. Alors, on répond : revenez dans trois ans. »

Souvent, les banques ne jouent pas le jeu…

Si le dossier ne passe pas la barre de l’assureur, aucune chance que la banque accorde son prêt. Même chose si l’assureur donne un accord a minima. « Entre 25 et 30 % des dossiers difficiles sont acceptés en troisième examen par les assureurs avec au moins une garantie décès, indique le Dr Tchoreloff. Mais un tiers seulement des emprunteurs accepte ces conditions. » Ce qui est sans doute encore trop ! « Pressés par le temps, parce qu’ils ont déjà signé une promesse de vente, les gens acceptent des conditions d’assurance minimales », remarque Marianick Lambert, secrétaire générale du Collectif interactif sur la santé (CISS), qui siège à la commission de médiation Aeras et au sein du comité de pilotage du plan cancer.

…Et les contrats d’assurance excluent le cancer

Or, trop de contrats d’assurance excluent la pathologie cancéreuse. En clair, l’emprunteur n’est pas couvert en cas de récidive. Problème : « Les banques refusent les contrats qui ne couvrent que le risque décès ou invalidité totale et définitive (PTIA), observe Philippe Thébault. Elles ne veulent pas se retrouver avec des impayés, et récupérer le bien immobilier en cas de défaut ne les intéresse pas. » C’est cette même logique « assurancielle » des banques qui rend difficile le recours aux garanties alternatives prévues par la convention Aeras.

Des garanties alternatives sont pourtant légales

Rien n’oblige en effet un emprunteur à disposer d’une assurance s’il est en mesure de présenter d’autres garanties : un contrat de prévoyance, un contrat d’assurance vie, un patrimoine immobilier, etc. « Mais, en réalité, les banques jugent insuffisantes les garanties offertes par un contrat de prévoyance lié à un emploi. Elles répondent qu’on peut toujours perdre son emploi, souligne Marianick Lambert. Idem pour les gens dont la seule garantie est d’hypothéquer le bien immobilier qu’ils achètent. Les banques n’en veulent pas. » « Les garanties alternatives, pour moi, c’est le monstre du Loch Ness, commente Philippe Thébault. On en parle beaucoup, mais je n’en ai jamais vu se substituer à un contrat d’assurance. D’ailleurs, j’en veux davantage aux banques qu’aux assureurs : je considère que ce sont elles qui freinent le plus. »

Un détournement de la loi

Une autre preuve ? La loi Lagarde, de septembre 2010, prévoit le libre choix de l’assurance et précise que les banques sont « tenues à garantie équivalente ». En clair, rien n’oblige un emprunteur à faire appel à l’assurance de sa banque. Libre à lui de se tourner vers l’assurance qui lui offrira les meilleures conditions. « Mais certaines banques proposent alors un taux d’intérêt supérieur à celui qu’elles auraient offert à l’emprunteur s’il avait choisi leur assurance. C’est un détournement de la loi », dénonce Marianick Lambert.

Une prometteuse ‘‘garantie invalidité’’

Qu’est-ce qui pourrait assouplir la position des banques ? « La nouvelle garantie spécifique invalidité prévue par la convention Aeras révisée de 2011 », répond Yves Couturier. Cette garantie invalidité, qui couvre le risque de rechute – c’est la grande nouveauté – lorsqu’elle entraîne une invalidité d’au moins 70 %, devrait permettre de lever l’un des principaux obstacles à l’assurabilité des malades. « C’est potentiellement l’avancée la plus prometteuse, reconnaît Marianick Lambert. Mais pour l’instant, on n’a encore rien vu. Il faudra attendre la fin de l’année pour disposer des premiers chiffres. » « De nombreux assureurs rechignent à la mettre en place », observe Philippe Thébault. « Moi, je peux vous assurer qu’à la CNP nous avons fait plusieurs dizaines milliers de dossiers en 2012, réplique Yves Couturier. C’est une vraie bonne solution. Cela a été long à mettre en place. Mais quand quelques grands assureurs auront fait la preuve que ça marche, tout le monde suivra. » « Les assureurs avancent à la vitesse d’escargots, estime enfin Marianick Lambert. De l’intérieur, on sait que ça progresse, même si on n’en voit pas encore les effets sur le terrain. »

Christophe D’Antonio

* Les sociétés de réassurance sont chargées d’assurer les assureurs eux-mêmes et de leur fournir les éléments techniques nécessaires à l’évaluation des risques.


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