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Une radiothérapie accélérée grâce à l’appareil Papillon + testé à Nice

{{ config.mag.article.published }} 20 juin 2019

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Le professeur Jean-Pierre Gerard et la Dr Magali Dejode, chirurgienne au centre Antoine Lacassagne à Nice entourent le Papillon +, accompagnés par les ingénieurs d’Ariane.

Remplacer six semaines de radiothérapie par quelques minutes de radiations sous anesthésie ? C’est possible, selon le Pr Jean-Pierre Gérard du centre Antoine Lacassagne de Nice. Il est le créateur de Papillon +, un appareil de radiothérapie qui permet aux patientes de rentrer chez elle le soir-même de leur opération avec leur dose de radiothérapie délivrée en une seule fois. L'appareil est à l'essai. Entretien avec son inventeur.

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Comment avez-vous eu l’idée d’un tel appareil ?

Pr Jean-Pierre Gérard – En France, sur les 400 000 cancers détectés par an, environ 200 000 sont traités par radiothérapie. La technique la plus répandue est l’utilisation d’accélérateurs de particules. Ce sont de gros appareils, très chers, et le traitement dure de 5 à 6 semaines. La seconde méthode est la radiothérapie de contact, avec des appareils plus petits, qui permet de traiter 5 à 10% des cancers, où les tumeurs sont petites et accessibles, comme les cancers de la peau, du rectum ou du sein. On applique alors directement le tube à rayons X au contact de la tumeur. Dans le cas des petits cancers du rectum par exemple, on utilise Papillon 50 pour faire disparaître la tumeur sans chirurgie lourde. Concrètement, on dispose le tube à rayons X dans le rectoscope et on dispense une charge de rayons très ciblée. Il y a trois appareils de ce type en France. Parallèlement à Papillon 50, un laboratoire allemand a développé l’Intrabeam dans les années 2000, spécialisé quant à lui dans le traitement des cancers du sein. Une charge de rayons est dispensée en 30 minutes, pendant l’opération. J’ai eu l’idée de fusionner ces deux technologies pour les cancers du sein. C’est comme ça qu’est né Papillon +, avec l’aide des ingénieurs anglais d’Ariane.

Comment cela fonctionne ?

La patiente arrive au bloc à 8h30. Le chirurgien retire la tumeur puis l’équipe médicale passe le tube à rayons X dans la cavité de tumorectomie à l’aide d’un applicateur sphérique et pendant quelques minutes, la patiente reçoit une quantité de rayons équivalente à celle de Papillon 50, mais délivrée plus rapidement qu’avec l’Intrabeam (1mn au lieu de 30) et avec un faisceau plus large, adapté aux cancers du sein. C’est un gain de temps pour tout le monde : le chirurgien, le directeur de l’hôpital qui peut utiliser ses blocs opératoires plus rapidement et la patiente qui évite un long traitement de plusieurs semaines. Psychologiquement, l’effet est aussi important : on dédramatise la maladie.

Quelles sont les conditions pour participer à l’essai Papillon + ?

Les patientes doivent avoir 60 ans ou plus. Avant cet âge, il est moins facile de détecter la taille de la tumeur car les seins sont plus denses. La tumeur doit ensuite faire 2 centimètres ou moins, ne pas avoir de caractères biologiques négatifs ni de ganglions.

Quels sont les résultats pour l’instant ?

Depuis le début de l’étude, en octobre 2018, nous avons traité 15 personnes, donc le recul est faible. En tout, 44 doivent entrer dans l’essai. Pour l’instant, dans 10 à 15% des cas, nous nous rendons compte après analyse de la tumeur qu’elle est plus agressive que prévu. Dans ces cas-là, nous complétons avec de l’irradiation classique pendant quatre semaines. Jusqu’à présent, aucune des patientes n’a eu de complications, ni de rechutes. A long terme, nous visons 90 à 95% de guérison définitive, moins de 5% de rechutes locales et de bons résultats esthétiques dans tous les cas.

Comment sont suivies les patientes après l’irradiation péropératoire ?

Elles ont un suivi habituel : elles revoient le chirurgien puis l’oncologue et le radiothérapeute environ six semaines après l’opération. Ensuite, elles ont des rendez-vous de contrôle tous les trois mois avec échographies, prises de sang et scanner si besoin.

Quelle est la suite pour le Papillon + ?

L’étude doit se terminer fin 2019, puis va être publiée. Grâce à cette publication, on espère obtenir un marquage CE (qui permet de s’assurer de la conformité de l’appareil aux normes européennes). L’objectif est de mettre à disposition 10 à 15 appareils en France d’ici 2021-2022, 50 dans l’Union européenne… Pour l’instant, nous sommes toujours en phase de recherche clinique et nous n’avons pas de résultats scientifiques à long terme.

Voyez-vous des améliorations à faire sur votre appareil à l’avenir ?

Nous devons progresser pour adapter la technologie Papillon + aux cancers du col utérin, de la vessie, ou pédiatriques. L’avenir de cet appareil est indéniable. Si dans dix ans, 10 à 20% des cancers sont traités en radiothérapie de contact peropératoire, ce serait déjà un grand bénéfice pour tous. Mais pourquoi ne pas non plus le simplifier pour le rendre transportable dans les pays en voie de développement, et accessible à nos confrères qui n’ont pas accès à la radiothérapie.

L’avis négatif de la Haute Autorité de Santé (HAS) sur la radiothérapie peropératoire

Le dispositif Papillon + n’est pas remboursé par la sécurité sociale, tout comme son ancêtre l’Intrabeam. La Haute Autorité de Santé (HAS) a rendu un avis négatif sur la radiothérapie peropératoire dès 2016. Une évaluation réalisée à la demande de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) et de l’Institut national du cancer (INCa) dans le cadre du Plan cancer 2009-2013. Dans son rapport, la HAS pointe les connaissances insuffisantes pour démontrer l’intérêt de cette modalité de radiothérapie en termes d’efficacité mais aussi de toxicité. Pas de bénéfices pour les patientes prouvés ni de diminution du coût global observé. Cet appareil reste donc confiné à un cadre de recherche clinique et ne sera pas pris en charge par l’Assurance maladie. Aucune évaluation n’a été réalisée depuis. « Il est évident que si une nouvelle évaluation devait se lancer, elle prendrait en compte les patientes soignées avec l’appareil Papillon+ », confirme une source de l’HAS.

Propos recueillis par Mathilde Durand


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