À RETENIR SUR LE SUJET :
– Depuis le 24 avril, la loi prévoit qu’un salarié cumule 2 jours de CP par mois lors d’un arrêt pour maladie non professionnelle.
– Ces nouvelles dispositions s’appliquent aux arrêts pour maladie non professionnelle déclarés depuis le 1er décembre 2009.
– Les CP acquis pendant cette période peuvent être reportés sur une période de 15 mois.
En France, le Code du travail prévoit qu’un salarié puisse cumuler des congés payés (CP) sur ses périodes travaillées (2,5 jours par mois). Jusqu’à présent, s’il était en incapacité de travailler à cause d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, ce cumul se poursuivait pendant une année. En revanche, s’il était contraint d’interrompre son activité en raison d’une maladie non professionnelle, l’acquisition de CP était suspendue pendant toute la période de son arrêt.
Trois arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 ont jugé que ces dispositions du Code du travail étaient contraire à la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne qui garantit l’universalité du droit au repos à tout travailleur. Depuis le 24 avril, en vertu de l’article 37 de la loi n° 2024-364, un salarié peut donc désormais acquérir des CP pendant un arrêt maladie, même si celle-ci n’est pas professionnelle. Maître Nicolas Durand-Gasselin, avocat en droit social, décrypte pour nous ces nouvelles dispositions.
Combien de CP peut-on désormais acquérir lors d’un arrêt maladie ?
Maître Nicolas Durand-Gasselin : Cela dépend de la cause de l’arrêt de travail. S’il résulte d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail, le salarié cumule 2,5 jours de CP par mois, comme c’est le cas sur une période effective de travail.
En revanche, si l’arrêt fait suite à une maladie non professionnelle, les nouvelles dispositions prévoient que le salarié cumule 2 jours de CP par mois.
Cette loi s’applique-t-elle aux arrêts maladies déclarés avant l’entrée en vigueur de la loi ?
Tout à fait, il s’agit d’une loi rétroactive. Elle s’applique aux arrêts pour maladie non professionnelle déclarés depuis le 1er décembre 2009.
Si un salarié ne peut pas poser les CP qu’il a acquis pendant son arrêt maladie, que se passe-t-il ?
En temps normal, un salarié est tenu de poser ses congés pendant une période définie, qui dure un an, On l’appelle “période de prise de congés”. Si le salarié n’a pas posé ses CP pendant cette période, il les perd.
Pour les CP acquis pendant un arrêt maladie, qu’elle soit professionnelle ou non, la loi prévoit que le salarié puisse les reporter pendant 15 mois.
La loi prévoit 2 cas de figure pour le calcul de ce report.
Si le salarié est en arrêt depuis moins d’un an pendant la période de prise de congés, le délai de report court à compter de la reprise du travail. Prenons l’exemple d’une personne arrêtée entre janvier et février, et qui a repris le travail en mars. Elle aura cumulé 4 jours de CP pendant ses 2 mois d’arrêt qu’elle pourra poser dans un délai de 15 mois à compter de mars.
Et si la personne est en arrêt pendant plus d’un an ?
Si le salarié est en arrêt pendant plus d’un an, c’est-à-dire sur plusieurs périodes de prise de congés, le report de 15 mois débute à la fin de la période de prise de congés. Au terme des 15 mois de report, les CP sont définitivement perdus. La loi laisse toutefois aux partenaires sociaux la possibilité de prolonger ce délai dans le cadre de négociations d’entreprise.
Pouvez-vous nous donner un exemple pour qu’on comprenne mieux ?
Prenons le cas d’une femme arrêtée en 2022 et en 2023 en raison d’un cancer, qui reprend le travail en mai 2024. Imaginons également, pour simplifier les choses, que son entreprise lui impose de poser ses CP entre le 1er janvier et le 31 décembre.
Comme elle a été arrêtée pendant toute l’année 2022, elle disposait de 15 mois à compter du 31 décembre 2022 pour poser les CP de 2022, donc jusqu’à mars 2023. Or en mars 2023, elle n’a pas pu les prendre puisqu’elle était encore en arrêt. Elle va donc perdre les CP qu’elle a cumulé en 2022.
Concernant les CP qu’elle a cumulé en 2023 (soit 24 CP), elle dispose également d’un délai de 15 mois à compter du 31 décembre 2023, donc jusqu’en mars 2025 pour les poser.
Concernant les CP qu’elle a cumulé pendant ses 4 mois d’arrêt en 2024 (de janvier à avril, soit 8 CP), elle pourra les prendre dans un délai de 15 mois à compter de mai 2024.
Concrètement, quelles démarches doit-on effectuer pour faire valoir ses droits ?
Il suffit d’en faire la demande à votre employeur.
Si vous êtes actuellement employé de l’entreprise, vous disposez d’un délai de 2 ans à compter du 24 avril 2024 pour réclamer vos CP.
Si vous avez quitté l’entreprise, vous disposez d’un délai de 3 ans pour demander le paiement d’indemnités compensatrices de congés payés.