Des mouvements lents et rythmés par le son des respirations. Ici, à la Maison RoseUp Paris, le temps semble s’être distendu. Au ralenti, sept femmes imitent avec précision les gestes de Magali Canté, leur professeur. C’est une séance de Tai Chi Chuan.
Des bienfaits multiples
Si cet art martial chinois ancestral est proposé aux femmes atteintes de cancer, c’est parce qu’il permet de soulager de nombreux effets indésirables liés aux traitements. « Les interventions peuvent entraîner des douleurs articulaires et musculaires ainsi que des limitations au niveau des bras et des parties du corps touchées par la chirurgie. Je vais donc beaucoup faire travailler la personne sur des mouvements d’étirement et de renforcement musculaire », explique Magali Canté.
Le Tai Chi n’agit pas seulement sur le corps. Il apaise également l’esprit. « Entre la respiration et les mouvements sur lesquels on doit se concentrer, on est obligé d’être là. On ne pense plus à rien d’autre. » confirme Valérie, atteinte d’un cancer du sein métastatique. Mieux encore, cette pratique améliorerait les fonctions cognitives. « Mémoriser deux ou trois mouvements et les exécuter ensuite permet de démarrer de nombreuses connexions dans le corps. Cela multiplie la vivacité et la concentration », affirme Magali. « Depuis que je suis sous thérapie ciblée et hormonothérapie, j’ai remarqué que j’avais des pertes de mémoire, comme des bugs en fait, admet Valérie. Je pense que le Tai Chi va m’aider. »
Douleurs, mémoire, stress, insomnie, … Les bienfaits du Tai Chi sont multiples. Ce qui lui vaut d’être considéré par l’académie de médecine comme une thérapie complémentaire.
Un art martial tout en douceur
Le Tai Chi Chuan est né en Chine il y a près de 700 ans. La discipline repose principalement sur des taos : un combat contre un adversaire imaginaire, composé d’une série de mouvements enchaînés de façon fluide et avec lenteur. Le Tai chi travaille l’ancrage, les appuis, les transferts de poids, … Selon la philosophie chinoise, sa pratique régulière permettrait même de mieux faire circuler l’énergie, le “Qi”.
Il s’agit d’un art martial dit “interne”, c’est-à-dire qui se focalise sur la respiration et les sensations, contrairement aux arts martiaux dits “externes” (le kung fu, par exemple), plutôt axés sur la force. Les personnes réticentes au combat peuvent donc se rassurer : ici, on ne porte pas de coups. Une pratique tout en douceur, abordable par tous, et qui ne présente pas de contre indications. « Il faut tout de même vérifier que la personne soit bien placée et ne pas oublier qu’une personne malade peut avoir des limitations », insiste Magali, en demandant à Valérie de replacer son dos.
« Les personnes retrouvent très vite des sensations dans le corps comme les appuis, la verticalité, la mobilité de la cage thoracique, les différents os,… » – Magali Canté
Une pratique facile d’accès
Pour un novice, les taos peuvent être compliqués à mémoriser. C’est pourquoi Magali s’attache à décomposer chaque mouvement : « On pousse sur son pied, ça fait monter une main et descendre l’autre » commente le professeur en accompagnant la parole par le geste. Concentrée, Valérie imite avec application les mouvements de sa professeur.
En à peine deux séances, cette adhérente de la Maison RoseUp est devenue accro. « C’est une sensation d’apaisement. Lorsque je descends mes bras, tout ce qui est lourd descend dans mes pieds et la tête est plus légère. À la fin du cours, je me sens plus ancrée. Plus sûre de moi. » Nul besoin donc d’être un expert pour profiter des bienfaits du Tai Chi. Ce que confirme Magali : « Les personnes retrouvent très vite des sensations dans le corps comme les appuis, la verticalité, la mobilité de la cage thoracique, les différents os, … »
Pour Valérie, le Tai Chi est désormais essentiel dans son parcours de soin. « Avec les traitements, j’ai une fonte musculaire rapide et les positions maintenues sont importantes pour lutter contre ce phénomène ». Petit plus pour le moral : le collectif. « On partage toutes les mêmes difficultés et on est là pour faire quelque chose en commun. Ce lien social est fondamental lorsque l’on a un cancer. »