La semaine dernière, le Parlement votait une loi visant à améliorer la prise en charge des soins et des dispositifs spécifiques aux traitements du cancer du sein¹. Par cette initiative, la représentation nationale mettait ainsi en lumière la réalité cachée du cancer en France.
Si nous avons la chance de bénéficier d’une prise en charge des traitements grâce au système de l’ALD (Affection longue durée), ce que l’on sait moins, c’est que le cancer précarise, en particulier les actifs.
En effet, ils voient leurs ressources baisser du fait des arrêts maladie de longue durée et doivent également supporter des restes à charge importants liés à la maladie et aux traitements : dépassement d’honoraires pour les examens de contrôle ou la reconstruction mammaire en secteur 2, prise en charge partielle ou nulle de certains dispositifs médicaux et soins de support non médicamenteux dont les bénéfices sont unanimement reconnus sur la qualité de vie voire sur la guérison et la réduction du risque de rechute pour certains, notamment l’activité physique adaptée.
Le législateur a tenté d’apporter un début de solution sur certains sujets mais ce texte ne constitue nullement la grande avancée annoncée dans de nombreux médias.
- Premièrement, parce que la plupart des sujets de prise en charge ne relèvent pas de sa compétence et que sans financement correspondant la plupart des mesures risquent de ne pas voir le jour. Et le contexte actuel de restriction budgétaire ne porte pas à l’optimisme sur ce point.
- Deuxièmement parce que la liste des sujets abordés n’est que parcellaire.
- Troisièmement parce qu’elle se focalise sur le seul cancer du sein de façon totalement injustifiée, créant une inégalité entre les personnes malades. Car, oui évidemment les restes à charge concernent tous les types de cancer.
Monsieur le ministre, vous qui êtes un professionnel de santé de terrain, les personnes malades comptent sur vous pour aborder enfin le sujet de la qualité de vie et des restes à charge de façon globale. L’effort mis, à juste titre, sur la prévention liée aux comportements individuels, ne peut suffire. Face à l’explosion du nombre de cancers chez les personnes de plus en plus jeunes², il est plus que temps de mener des études à grande échelle sur les facteurs environnementaux et de renforcer le rôle des registres nationaux.
Pour résoudre le sujet des restes à charge, il est urgent non seulement de mettre en place un forfait 100% cancer sur le modèle des soins dentaires ou optiques en impliquant l’Assurance Maladie et les complémentaires santé, mais aussi de prendre en charge les soins de support qui évitent d’autres dépenses de santé.
Enfin, alors que de plus en plus d’actifs sont et seront touchés par la maladie, il convient de lutter contre la précarisation liée au cancer en favorisant le maintien et le retour à l’emploi, en étendant l’obligation de souscrire une prévoyance à l’ensemble des salariés mais aussi aux travailleurs non-salariés et professions libérales afin de limiter la baisse du niveau de vie.
Monsieur le ministre, les associations qui accompagnent TOUS les malades de cancer, quelle que soit leur pathologie, comptent sur vous.
Vous pouvez également compter sur RoseUp pour travailler à vos côtés à la mise en place d’une politique ambitieuse et globale à la hauteur des enjeux.
Isabelle Huet, directrice de RoseUp Association et son équipe
¹Proposition de loi, adoptée sans modification, par l’Assemblée nationale, en deuxième lecture, visant à améliorer la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein par l’assurance maladie le 28 janvier 2025, T.A. n° 35
²En 2023, une étude internationale publiée dans le British Medical Journal a révélé qu’à l’échelle mondiale, l’incidence des cancers chez les moins de 50 ans avait augmenté de 79,1 % entre 1990 et 2019. Les conclusions d’une publication parue en décembre 2024 dans le Lancet Oncology prévoient une hausse d’environ 12 % du nombre de nouveaux cas de cancer et de décès liés au cancer chez les patients de moins de 40 ans entre 2022 et 2050.