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Cancer du poumon : une immunothérapie réduit de 40% le risque de décès

{{ config.mag.article.published }} 19 avril 2022

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Associer une immunothérapie à la chimiothérapie néoadjuvante permet de réduire considérablement les risques de décès par cancer du poumon non à petites cellules. C'est ce que vient de démontrer l'étude CheckMate-816. Le Pr Nicolas Girard, oncologue et pneumologue à l'Institut du thorax Curie Montsouris, la décrypte pour nous.

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Le cancer du poumon est la principale cause de décès par cancer dans le monde et le 3ème cancer le plus fréquent en France. La grande majorité (84%) des cancers du poumon diagnostiqués sont dits « non à petites cellules » et le sont à un stade non métastatique. Si la chirurgie permet la guérison d’un grand nombre de malades, dans 30 à 55% des cas, le cancer va récidiver.

C’est dans ce contexte qu’a été menée l’étude internationale CheckMate-816 dont l’objectif était de tester un nouveau traitement, combinant immunothérapie et chimiothérapie, administré en amont de l’intervention chirurgicale. Le Pr Nicolas Girard, oncologue et pneumologue à l’Institut du thorax Curie Montsouris, a présenté ses résultats lors du congrès AACR1 le 11 avril dernier. Il nous explique en quoi ce traitement est révolutionnaire et quels patients pourront en bénéficier.

Pour commencer, pouvez-vous nous présenter l’étude Checkmate-816 ?

Pr Girard : Il s’agit d’une étude de phase 3 qui visait à déterminer l’intérêt d’associer de la chimiothérapie à une immunothérapie : le nivolumab ou Opvido. Les 2 traitements étaient administrés en même temps, en 3 cycles, par perfusion. Ce nouveau traitement était comparé au traitement standard : la chimiothérapie seule.

Les patients inclus dans l’étude étaient atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules résécable, c’est-à-dire éligibles à la chirurgie. La combinaison nivolumab+chimiothérapie était administrée avant l’intervention chirurgicale, en néoadjuvant.

Quels sont les résultats de cette étude ?

On a montré que ce traitement permet de réduire de 37% le risque de récidive et de 43% le risque de décès. C’est assez rare en oncologie des tumeurs solides d’avoir des réductions aussi importantes.

Par ailleurs, on a observé une réponse complète chez 24% des patients traités avec la combinaison immunothérapie+chimiothérapie, contre seulement 2% avec la chimiothérapie seule. Autrement dit, chez près d’un quart des malades, il n’y avait plus de traces de cellules cancéreuses au moment de la chirurgie.

Ce traitement pourrait donc éviter une intervention chirurgicale ?

Non car malheureusement, pour constater qu’il n’y a plus de tumeur, nous sommes obligés d’ouvrir le thorax. Mais c’est une vraie question qui doit faire l’objet de recherches.

En revanche, on a constaté dans cette étude que, chez les patients ayant reçu la combinaison immunothérapie+chimiothérapie, l’intervention chirurgicale était moins longue. Sans doute parce que ce traitement diminue la taille de la tumeur de manière plus importante et rend donc la chirurgie plus facile.

Le traitement a-t-il été bien toléré par les patients ?

Oui. On sait que l’immunothérapie peut provoquer des effets secondaires différents de ceux de la chimiothérapie : des toxicités inflammatoires ou auto-immunes. Elles étaient exceptionnelles dans cette étude. Probablement parce que l’exposition à l’immunothérapie était très courte : le protocole ne prévoit que 3 injections.

Avec de tels résultats, les patients peuvent-ils s’attendre à obtenir un accès précoce à ce traitement ?

On l’espère évidemment ! C’est à présent entre les mains de BMS, puisque c’est au laboratoire propriétaire du nivolumab de faire la demande d’accès précoce auprès des autorités de santé. Aux États-Unis, ce traitement a déjà été approuvé par la FDA2 avant même la publication de l’étude, au vu de l’importance des bénéfices obtenus.

Concrètement, qui pourra bénéficier de ce traitement ?

Tous les patients qui auraient bénéficier en temps normal d’une chimiothérapie néoadjuvante. Il y a peu de contre-indications.

Par ailleurs, il faut noter que, même si le nivolumab cible le marqueur PD-1, ce traitement est également efficace chez les patients qui ne l’expriment pas. Il n’y aura donc pas de sélection des patients sur ce critère.

Ce traitement va donc révolutionner la prise en charge des patients…

En effet. Et à plusieurs égards.

Aujourd’hui, la chimiothérapie est administrée soit avant la chirurgie, en néoadjuvant, soit après, en adjuvant. Le problème avec le fait de réaliser la chirurgie d’abord, c’est que la moitié des patients ne bénéficient jamais de la chimiothérapie parce que les complications post-opératoires font qu’ils sont trop fatigués pour la recevoir. L’avantage d’administrer la chimiothérapie avant la chirurgie, c’est qu’on est sûr que tous les patients la recevront.

Quand on voit maintenant les bénéfices de l’immunothérapie avant la chirurgie, cela donne des arguments supplémentaires pour réaliser la chirurgie après. Parce que, si on fait la chirurgie d’abord et ensuite l’immunothérapie+chimiothérapie, le traitement sera peut-être aussi efficace – on ne peut pas le dire à ce jour car les études sont en cours – mais la moitié des patients n’en bénéficieront pas.

Quelle est la place de l’immunothérapie dans le cancer du poumon ?

Actuellement, l’immunothérapie est indiquée dans les situations métastatiques ou avancées. Avec cette étude, on remonte les lignes. C’est une démarche logique. Il est aujourd’hui clair que l’immunothérapie devient incontournable dans le traitement du cancer du poumon.

Propos recueillis par Emilie Groyer

1. Annual Symposium on Global Cancer Research : congrès international sur la recherche contre le cancer
2. Administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments qui autorise notamment la commercialisation des médicaments sur le territoire des États-Unis


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Emilie Groyer

Rédactrice en chef du site web de Rose magazine. Titulaire d'un doctorat en biologie, Emilie a travaillé 10 ans dans le domaine des brevets en biotechnologie avant d'opérer une reconversion dans le journalisme. Elle intègre la rédaction de Rose magazine en 2018. Sa spécialité : vulgariser des sujets scientifiques pointus pour les rendre accessibles au plus grand nombre.

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