Et si une simple barre métallique de plus de 2 mètres de long, dressée à la verticale, pouvait donner la sensation de voler ? C’est ce que promet la pole dance. A priori, ce sport à la croisée du sport et de la danse, semble inaccessible à qui n’est pas, à la base, spécialement souple et musclée, ou qui subit des séquelles physiques d’un cancer. Eh bien, on se trompe !
Laure-Anne Billot, kinésithérapeute spécialisée dans la prise en charge des femmes touchées par un cancer du sein, transforme, tous les samedis, son cabinet de consultation en studio de danse pour ses patients. « Certaines et certains, car je propose aussi aux hommes de participer, n’auraient jamais imaginé – ni osé – faire de la pole dance. Puis, finalement, ils se disent : “Pourquoi pas ? Je ne suis plus à ça près !” »
Un sport valorisant
En général, ceux-là sortent de leur premier cours conquis. Il faut dire que la kiné et danseuse sait rendre ce moment « amusant, original et adapté ». « Forcément, c’est plus facile pour les sportives ou celles qui font déjà de la danse, mais tout le monde peut essayer la pole dance, et s’y épanouir. C’est une discipline valorisante et gratifiante. Chacun avance à son rythme, et les mouvements sont modifiables en fonction des gênes, au niveau des cicatrices par exemple », explique celle qui est aussi présidente de Rose’n Pole.
Cette association rennaise a pour vocation d’offrir des séances d’initiation à la pole dance aux personnes en situation de cancer. Une séance se déroule quasiment toujours de la même manière : échauffement et assouplissement, suivis de l’apprentissage de nouvelles figures ou de la reprise de plusieurs exercices techniques de base, souvent par groupes de deux.
BON À SAVOIR : Pour trouver un club près de chez vous, rendez-vous sur le site de la Fédération française de danse ou sur ecoles-poledance.fr.
La force du collectif
En général, on commence par s’initier à la figure du V, puis au levé de jambe, et on continue avec des accroches de jambe basiques (tels que l’outside et l’inside) et les tours de barre… à la fin des sessions, un combo est à réaliser à la barre.
Sous les encouragements du groupe, chacun et chacune essaie de l’exécuter à hauteur de ses possibilités. Le tout en sécurité, puisque les autres danseurs sont là pour parer au petit coup de faiblesse ou à l’éventuel décrochage. Des petits défis qui invitent à repousser ses limites, grâce à la force du collectif. Au fil des entraînements, et l’assurance aidant, on parvient à mieux s’exprimer et à laisser parler sa propre créativité.
« En général, au bout d’un an », estime Laure-Anne Billot. « Il y a un peu d’engagement, et un petit coup d’adrénaline, quand on essaie de nouvelles figures, analyse de son côté Marion Larcheron. Et beaucoup de fierté quand on les réussit. Il y a aussi des jours où l’on a envie de tenter plein de choses et d’autres où l’on est moins productive. Il faut apprendre à s’écouter. »
Une activité adaptée au cancer
Originaire de l’Essonne, la jeune femme de 39 ans s’est découvert une passion pour cette activité en regardant une émission de télévision. Ni le Covid-19 en 2020 (qui a entraîné la fermeture de son club de pole dance) ni le diagnostic de son cancer du sein, tombé l’année suivante, ne l’ont éloignée de la barre.
« Arrêter ? Ce n’était même pas une option. Bien sûr, il a fallu s’adapter. Pendant la chimio et la radiothérapie, j’avais moins de force. Je me limitais à une figure et à une demi-heure de séance quotidienne au lieu d’une heure et demie. Il y a tant de façons de travailler dans ce sport qu’il est toujours possible de trouver des adaptations lorsque l’on se sent fatiguée. »
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Un sport très complet
Surtout, insiste cette addict, qui a investi 400 euros pour installer une barre chez elle, « la pole dance fait du bien au moral ». « Autour de la barre, je me sens à nouveau normale… » rapporte-t-elle. Et souvent courbaturée !
Pour dompter la grande tige d’acier, le gainage et les abdominaux seuls ne suffisent pas. Les bras, le dos, les épaules travaillent énormément, tout comme les jambes, fortement sollicitées. C’est un sport très complet, sculptant, qui demande de la souplesse, de la force, de l’endurance, qui fait travailler le cardio et l’amplitude des chaînes articulaires.
« Grâce à la pole dance, on se découvre des muscles que l’on ne soupçonnait même pas ! » s’amuse Marion. Quand on lui demande ce qui lui plaît tant dans cette pratique, elle répond sans hésiter : « la sensation de voler » quand elle enchaîne roulade, flip, pirouette et cochon pendu.
Aérienne, gracieuse et sensuelle
Bien maîtrisée, une démonstration de pole dance s’avère aérienne, fluide, gracieuse et sensuelle. Comme dans toute discipline sportive qui se respecte, les meilleurs athlètes s’affrontent dans des compétitions de haut niveau, dont des championnats du monde, où les tricolores s’illustrent régulièrement. Avec plus de 300 clubs et associations disséminés dans toute la France, la pole dance, longtemps considérée comme trop « sexy » pour être sérieuse, s’émancipe petit à petit de ce cliché.
« Au début, je n’osais pas dire que je faisais de la pole dance, se souvient Marion. J’avais peur que l’on m’assimile à une strip-teaseuse. Surtout les hommes, qui y vont toujours de leurs commentaires, du genre : “C’est ton mari qui doit être content !” Aujourd’hui, j’en suis plutôt fière et je m’en amuse en rétorquant que mon conjoint, lui, a bien compris que c’était un sport avant tout ! »
Les talons de 40 centimètres de haut, les décolletés et les strings appartiennent à l’univers du cinéma et du monde de la nuit. Lorsqu’on s’exerce dans un club ou une asso, « on s’exprime et on s’habille selon son envie. On peut partir sur un style très simple ou bien très exotique ! »
Réinvestir son corps
Malgré tout, les tenues courtes sont privilégiées, car la peau accroche mieux sur la barre que les vêtements. « Bras, cou, jambes, ventre, dos… Toutes les parties du corps en contact avec la barre doivent être nues pour adhérer à la barre et faciliter les mouvements. On se trouve finalement vite à l’aise entre nous », constate Marion, qui pratique désormais au sein du club Bety Pole, en Seine-et-Marne.
Avec la pole dance, on réinvestit son corps, sa féminité. On stimule sa confiance et son estime de soi. Tandis qu’on virevolte autour de la barre, les préjugés que l’on a sur soi vont au tapis un à un : se sentir incapable, pas assez mince ni assez sensuelle ou athlétique… Tout cela aussi s’envole !
3 CHOSES À SAVOIR SUR LA POLE DANCE :
• Une séance d’une heure trente coûte entre 15 et 20 euros.
• Sportif, artistique, exotique, aérien… tous les styles se pratiquent !
• Arrivée en France en 2006, la pole dance est officiellement reconnue par la Fédération française de danse comme discipline sportive
et artistique depuis 2016.
