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Cancer du rein : immunothérapie ou chirurgie, une question de taille

{{ config.mag.article.published }} 19 juin 2025

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Illustration : Alice Des

Dans la prise en charge des tumeurs rénales, c’est leur diamètre qui dicte la stratégie. Et, si la chirurgie a longtemps été la pierre angulaire du traitement, émergent aujourd’hui des options thérapeutiques moins invasives.

Quand, à l’été 2023, Lauryne, 29 ans, maman d’un petit garçon de 3 ans, apprend que la masse qui s’est logée dans son rein droit est un cancer, elle se voit déjà sous chimiothérapie. « J’imaginais mes cheveux tomber, la fatigue des traitements, les conséquences pour ma famille, se souvient-elle. J’ai partagé mes craintes avec mon urologue, qui m’a rassurée en m’expliquant que le cancer du rein ne se traitait pas avec de la chimiothérapie, mais essentiellement par la chirurgie. »

En effet, les cellules cancéreuses qui se déploient dans le rein sont réputées être insensibles à ces médicaments, ainsi qu’à la radiothérapie classique. Reste donc la chirurgie – la néphrectomie –, le traitement de référence pour les carcinomes rénaux localisés. On compte 10 000 interventions réalisées chaque année en France. La néphrectomie peut être totale (ablation du rein), ou partielle (ablation de la tumeur uniquement), ce qui est le cas pour la moitié des patients atteints d’un cancer localisé.

« Lorsque la tumeur mesure moins de 4 cm, on se limite à cette intervention, qui permet de conserver la fonction rénale », décrit le Pr Arnaud Méjean, chef du service d’urologie de l’hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, Paris). C’est l’option dont a pu bénéficier Lauryne.

Conserver un rein fonctionnel

Cette chirurgie conservatrice, recommandée depuis les années 2000, est aujourd’hui challengée par de nouvelles techniques, moins invasives. L’une d’elles s’appuie sur le chaud ou le froid pour détruire la masse cancéreuse. En pratique, de longues aiguilles sont implantées dans la tumeur à travers la peau pour diffuser de la radiofréquence ou des micro-ondes, qui chauffent la tumeur, ou au contraire un liquide très froid, qui la gèle (cryo­ablation).

Ces traitements, dits thermo­ablations percutanées, sont préconisés depuis 2021 par l’Association américaine d’urologie comme options thérapeutiques de première intention pour les tumeurs rénales de moins de 3 cm. « En France, ils sont utilisés au cas par cas, essentiellement chez les personnes âgées de plus de 75 ans qui ne souhaitent pas être opérées ou qui ne supporteraient pas l’intervention », précise le Pr Laurence Albiges, chef du département de médecine oncologique de Gustave-Roussy.

Autre angle d’attaque : la radiothérapie stéréotaxique. Dernière-née des techniques non invasives, elle contredit l’idée selon laquelle les tumeurs du rein résistent aux radiations. En délivrant une dose très élevée de rayons directement au cœur de la tumeur, on maximise leur efficacité, et on épargne les tissus sains environnants.

De réels atouts pour détruire les petites tumeurs et conserver la capacité du rein à filtrer le sang et à éliminer les déchets toxiques. Une étude internationale publiée en 2022 a en outre montré que cette option, encore expérimentale, est sûre et efficace sur le long terme.

Limiter la néphrectomie par une surveillance active

Par ailleurs, la surveillance active (fondée sur des scanners ou des échographies réalisées tous les trois ou quatre mois) est une possibilité de plus en plus proposée pour limiter les néphrectomies ou les retarder. Elle concerne désormais aussi bien les patients les plus âgés ou les plus fragiles, pour lesquels la chirurgie est contre-indiquée, que les patients jeunes.

De récentes études ont en effet démontré que cette stratégie est sûre chez ces patients quand leur tumeur mesure moins de 2 cm et présente un faible risque d’évoluer vers une forme métastatique. La surveillance active est interrompue lorsque la croissance tumorale semble s’accélérer, que la tumeur dépasse les 4 cm de diamètre, que certains symptômes apparaissent (sang dans les urines, douleurs dans le flanc notamment) ou que le patient le demande.

Apprendre à vivre avec un seul rein

Passé un certain diamètre de la tumeur, la conservation de l’organe n’est plus envisageable. « Si la tumeur fait environ 7 cm ou plus et/ou a débordé sur des tissus environnants comme les ganglions ou les glandes surrénales (qui surplombent les reins), l’ablation totale du rein et des tissus touchés est indispensable pour prévenir l’apparition de métastases », précise le Pr Méjean.

C’est le cas pour la moitié des patients touchés par un cancer localisé, à l’instar de Mélanie, diagnostiquée en 2018, à l’âge de 35 ans. « Il a fallu alors apprendre à vivre avec un seul rein, et surtout à préserver celui qui reste. C’était d’autant plus important que, au vu de mon jeune âge, je vais devoir vivre longtemps avec un seul rein. Pas question de l’abîmer ! Alors je bois davantage et plus souvent qu’avant. J’ai limité aussi ma consommation de viande, de sel, et éliminé l’alcool et le tabac. »

Par-delà ces précautions, vivre normalement avec un seul rein en bon état de marche est tout à fait possible, et a peu d’impact sur l’espérance de vie. Néanmoins, un suivi régulier est recommandé pour s’assurer que le rein restant parvient à remplir son rôle de filtre. Une surveillance qui vise aussi à repérer le plus tôt possible la survenue d’une récidive ou le développement de métastases.

La peur de rechuter

Un tiers des patients sont confrontés à une rechute dans les cinq ans qui suivent la néphrectomie. « De très rares cas de récidive ont été décrits trente ans après la chirurgie, alors la surveillance peut durer de nombreuses années. Personnellement, je passe un scanner tous les deux ans depuis dix-sept ans. Je ne pense pas tous les jours à cette épée de Damoclès qui flotte au-dessus de ma tête, mais la semaine précédant l’examen, l’inquiétude est bien là », témoigne Denis Brézillon, vice-président de l’Association pour la recherche sur les tumeurs du rein (ARTuR), la seule association de patients du cancer du rein, qui a la particularité de regrouper à la fois des médecins, des malades et des proches de malade.

Une angoisse d’autant plus vive pour les patients opérés qu’il n’existait pas, avant 2023, de traitement adjuvant permettant de réduire le risque de récidive. « Cette stratégie avait échoué dans le passé avec les traitements par antiangiogéniques, une thérapie ciblée orale qui s’attaque à la formation des vaisseaux sanguins dont dépendent les tumeurs rénales pour croître, explique le Pr Albiges. Mais des données présentées en février dernier ont montré que l’administration, après la chirurgie, d’une immunothérapie par voie intraveineuse, le pembrolizumab, pendant un an, toutes les trois semaines, diminue de plus d’un tiers le risque de rechute ainsi que le risque de décès. »

Les promesses de l’immunothérapie face au cancer du rein

Au regard de ces résultats, de nombreuses équipes se sont demandé si cette molécule d’immunothérapie ne pourrait pas être prescrite encore plus tôt, c’est-à-dire avant la chirurgie. « Dans mon service, nous l’avons testée plusieurs fois et avons constaté une réduction du volume de la tumeur, comme si l’immunothérapie la dévorait. Des observations que nous ne sommes pas les seuls à faire, et qui ouvrent la voie à une stratégie néo-adjuvante », indique le Pr Méjean.

Si elle doit encore être validée par des essais cliniques de grande ampleur, cette découverte pourrait bien faire évoluer les usages en matière de néphrectomie, voire permettre d’éviter le recours au bistouri. Une révolution pour les patients !

Ce bouleversement des pratiques chirurgicales concerne déjà les patients atteints d’un cancer métastatique. En effet, depuis 2018 et la présentation de l’étude française Carmena, conduite par le Pr Méjean dans le cadre du congrès de l’Asco – le plus important congrès international de cancérologie, qui se déroule chaque année à Chicago –, le dogme de la néphrectomie totale a été ébranlé.

« En comparant la survie des malades ayant bénéficié du sunitinib, la thérapie ciblée de référence à l’époque, dès la détection de leur maladie à celle des patients opérés avant de recevoir le médicament, nous avons observé que la moitié des patients traités précocement était encore en vie au bout de dix-huit mois, contre treize mois pour les patients opérés. L’utilisation d’antiangiogéniques était aussi efficace seule qu’associée à la chirurgie », détaille le chirurgien.

Les antiangiogéniques en première ligne métastatique

Dès lors, les antiangiogéniques sont devenus le traitement de première ligne pour les patients atteints d’un cancer métastatique. S’ils se montrent efficaces sur les métastases, alors l’ablation du rein est proposée, pour obtenir la rémission.

Au cours de ces six dernières années, le sunitinib a été remplacé par des combinaisons thérapeutiques alliant soit une immunothérapie (pembrolizumab ou nivolumab) et un antiangiogénique (axitinib, lenvatinib ou cabozantinib), soit deux immunothérapies (ipilimumab et nivolumab).

Et la littérature scientifique montre clairement que ces différentes associations fonctionnent. Elles ont permis de doubler la survie des patients, la moitié d’entre eux sont encore en vie quatre ans après le début de leurs traitements. Elles sont donc recommandées en première intention avant une éventuelle chirurgie. En cas d’échec de ces associations, les oncologues peuvent prescrire un antiangiogénique seul puis une immunothérapie, ou inverser cette séquence.

Trouver la bonne association de médicaments

Mais une question demeure en suspens : parmi toutes les combinaisons actuellement disponibles, comment évaluer celle qui conviendra le mieux à un patient donné ? Alors qu’aucune comparaison n’a encore été effectuée, et qu’aucun élément biologique ne permet de guider les médecins, leur choix s’oriente en fonction du profil du patient, de l’agressivité de sa maladie ainsi que du résultat attendu du traitement.

« En choisissant une association immunothérapie et antiangiogénique, on mise sur un effet rapide sur les métastases pour tenter de faire régresser une maladie très agressive. Mais on sait que les patients n’y répondront que pendant deux ans environ. En revanche, si la maladie évolue lentement, on va plutôt choisir la double immunothérapie, qui a une action plus durable, tout en sachant que 40 % des patients seulement y répondent », spécifie le Pr Albiges, qui coordonne une étude européenne sur le sujet, nommée Care1.

Commencée au printemps dernier, cette étude a pour objectif de déterminer s’il est possible d’identifier les patients qui répondent le mieux à l’une ou à l’autre des stratégies. Trancher cette question est d’autant plus important que, malgré les avancées permises par ces innovations thérapeutiques, seul un patient sur dix obtient une rémission complète, selon les dernières données, révélées au début de 2024.

« Je fais des médita-siestes. » Christelle, 53 ans

« Depuis seize ans, je me bats contre un cancer du rein. J’ai connu le tout-chirurgie pour éliminer tumeur et métastases, mais depuis 2023 je bénéficie d’une combinaison de médicaments autorisée il y a peu. Un traitement source d’effets secondaires, dont fatigue, syndrome pieds-mains, diarrhées… J’essaie de prendre soin de moi en pratiquant, entre autres, des médita-siestes. Allongée, les yeux fermés, je respire lentement et j’observe toutes les sensations que je ressens des pieds à la tête. Cela m’apaise, et me permet d’entrer doucement dans le sommeil, sans même m’en rendre compte ! »

Le belzutifan, source d’espoirs

Les regards sont aujourd’hui tournés vers le belzutifan, une nouvelle classe thérapeutique. Autorisé aux États-Unis, il est encore en attente d’approbation en Europe, et est accessible uniquement dans le cadre d’essais cliniques. Comme les antiangiogéniques, ce médicament vise à détruire les vaisseaux sanguins dont s’alimente la tumeur, mais cette fois en agissant sur l’anomalie biologique à l’origine des cancers du rein les plus fréquents, les carcinomes à cellules claires.

Une nouvelle approche qui a fait ses preuves dans les formes héréditaires (1 % à 2 % des cancers du rein), et qui devrait vite trouver sa place parmi les traitements des maladies non héréditaires et métastatiques.

En effet, très récemment, des travaux robustes ont montré que le belzutifan écarte davantage la récidive du cancer chez des patients en échec de traitement que ne le fait le médicament de dernier recours, l’évérolimus, un anticancéreux qui bloque la prolifération des cellules en limitant l’apport de sang à la tumeur.

« Le belzutifan est proposé de plus en plus tôt. Il est expérimenté en association avec les combinaisons disponibles chez les patients qui présentent un cancer métastatique, mais aussi en adjuvant avec le pembrolizumab dans le cancer localement avancé », rapporte le Pr Laurence Albiges.

Vers un dépistage organisé du cancer du rein

Reste que l’acquisition de solutions pharmacologiques toujours plus performantes n’est pas la seule voie à explorer pour améliorer la prise en charge du cancer du rein. Pour cela, il faudrait intercepter plus tôt ce cancer sournois et silencieux, responsable d’environ 4 500 décès par an.

Aujourd’hui, la plupart des malades comme Lauryne, Denis ou Mélanie découvrent par hasard leur cancer, lors d’un examen d’imagerie réalisé pour une autre raison. Une détection fortuite qui met au jour des masses parfois aussi grosses qu’un poing ou ayant déjà atteint le stade métastatique, et dont aucun signe ne permettait de trahir la présence dans plus de 60 % des cas.

« On a cru à une simple infection. » Véronique, 47 ans

« Il y a deux ans, une vive douleur dans le flanc et l’apparition de sang dans mes urines m’amènent à consulter aux urgences. On suppose alors une simple infection du rein (pyélonéphrite), et je ressors avec des antibiotiques, qui ne feront rien. De retour aux urgences quelques jours  plus tard, une échographie révèle une tumeur  de 7 cm dans un de mes reins. Par chance, elle n’a pas envahi d’autres organes. L’ablation de mon rein aura tout de même été nécessaire. »

Aussi, de nombreux patients et proches de malade espèrent voir un jour la mise en place d’un dépistage du cancer du rein. Un intérêt partagé par de nombreux cliniciens. Mais, à l’heure actuelle, peu de données autorisent à affirmer que des examens d’imagerie réguliers, comme une échographie à partir d’un certain âge ou chez certaines populations à risques (hypertendus, tabagiques, obèses…), permettraient de réduire le risque de décès.

Quant à l’hypothèse d’une détection dans le sang d’une molécule particulière, elle reste inaccessible aujourd’hui : aucun biomarqueur fiable n’existe pour le cancer du rein. Le dépistage pourrait aussi avoir un effet pervers : favoriser le surtraitement de tumeurs bénignes ou ne menaçant pas la vie de la personne dépistée.

C’est ce que va tenter d’éclaircir un essai mené dans le Yorkshire (Royaume-Uni) par une équipe de l’université de Cambridge. Son but est d’apprécier la faisabilité d’un dépistage du cancer du rein dans le cadre d’un contrôle plus large des patients fumeurs. À suivre…

EN CHIFFRES

  • 6e cancer le plus fréquent
  • 15 000 nouveaux cas sont diagnostiqués  chaque année.
  • Entre 10 % et 40 %  d’entre eux sont d’emblée métastatiques, entre 10 % et 30 % évolueront vers une forme métastatique
  • 2 fois plus d’hommes que de femmes sont touchés par un cancer du rein
  • 60 ans, c’est l’âge seuil à partir duquel les personnes sont le plus susceptibles d’être atteintes

 

En partenariat avec la Fondation ARC

Retrouvez cet article dans Rose magazine n°27


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Anne-Laure Lebrun

Spécialiste des sujets de santé et d’éthique (PMA, fin de vie…), elle contribue régulièrement au Figaro, à Que choisir santé (éditions UFC-Que choisir), Santé Magazine… Elle collabore à Rose Magazine depuis 2019. « Ce que j’apprécie chez Rose, c’est le lien de proximité avec les lectrices. Elles nous disent que nos articles leur sont utiles, et ça c’est précieux. »

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