Sommaire
- C’est quoi un lymphœdème ?
- Qu’est-ce qui le provoque ?
- Quels traitements du cancer en sont la cause ?
- Quels sont les autres facteurs de risque ?
- Quel est le risque d'en développer un ?
- Touche-t-il les 2 bras ou les 2 jambes ?
- Au bout de combien de temps apparaît-il ?
- Peut-on le prévenir ?
- Quels sont les premiers signes ?
- Que faire ?
- Comment le diagnostique-t-on ?
- Comment réduire son volume ?
- Peut-il disparaître ?
- Qu’en est-il des traitements chirurgicaux ?
- Quelles sont ses complications ?
- Les traitements sont-ils remboursés ?
C’est quoi un lymphœdème ?
Le lymphœdème est une augmentation du volume d’un membre (bras1 ou jambe).
Contrairement à ce que son nom pourrait laisser penser, cette augmentation n’est pas uniquement due à un œdème constitué de lymphe. En réalité, elle résulte avant tout d’un épaississement de la peau et d’une accumulation de graisse. La lymphe n’est qu’une composante minoritaire du lymphoedème, comme on peut le voir sur ce schéma.

Qu’est-ce qui provoque un lymphœdème ?
Le lymphœdème est causé par une altération du système lymphatique.
Il peut résulter d’une anomalie constitutionnelle (on parle de lymphœdème primaire) ou d’une lésion des ganglions (on parle alors de lymphœdème secondaire).
Dans les 2 cas, la mauvaise circulation de la lymphe provoque une « inflammation locale » qui conduit à l’épaississement de la peau et à l’accumulation de graisse.
Quels traitements du cancer peuvent être à l’origine d’un lymphœdème ?
Il s’agit principalement de traitements contre le cancer du sein, les cancers gynécologiques (l’endomètre, le col de l’utérus ou les ovaires) et les mélanomes des membres inférieurs :
- le curage ganglionnaire : c’est la cause principale du lymphœdème. Le risque de lymphœdème augmente proportionnellement au nombre de ganglions retirés.
- la radiothérapie lorsqu’elle cible les zones du sein, du bassin, du creux de l’aisselle, celui de la clavicule, riches en ganglions.
- la curiethérapie lorsqu’elle est administrée dans le vagin.
Quels sont les autres facteurs de risque de lymphœdème ?
Chez les femmes atteintes par un cancer du sein ou gynécologique, les principaux facteurs de risque sont :
- l’obésité : les femmes avec un IMC supérieur à 30 kg/m2 au moment des traitements ont 4 fois plus de risque de développer un lymphœdème ;
- la mastectomie : les femmes ayant subi cette opération ont plus de risque de développer un lymphœdème que les femmes traitées par tumorectomie ;
- certaines chimiothérapies : en particulier les taxanes (docétaxel, paclitaxel…) ;
- les infections post-opératoires ;
- le fait de ne pas recourir à la reconstruction mammaire après une mastectomie ;
- certaines prédispositions génétiques.
Quel est le risque de développer un lymphœdème après un cancer ?
Le risque est de :
– 20% (une femme sur 5) après un cancer du sein traité par curage axillaire. Ce risque chute à 6% quand la technique du ganglion sentinelle a été mise en œuvre,
– 25% (une femme sur 4) après un cancer gynécologique,
– 30% après un mélanome touchant les membres inférieurs traité par curage inguinal.
Le lymphœdème touche-t-il les 2 bras ou les 2 jambes ?
Les lymphœdèmes des membres supérieurs ne touchent généralement qu’un seul bras : celui du côté où a été réalisé le curage ganglionnaire.
Les lymphœdèmes des membres inférieurs peuvent en revanche toucher les 2 jambes.

Au bout de combien de temps le lymphœdème apparaît ?
Le délai d’apparition d’un lymphœdème est très variable.
Dans le cas du cancer du sein (cancer dans lequel le lymphœdème est le plus étudié), il survient dans les 2 ans suivant les traitements pour la moitié des femmes. Cela signifie que pour la moitié d’entre elles, le lymphœdème peut se développer 5, 15 voire 20 ans après.
TÉMOIGNAGE : Nicole a été atteinte d’un lymphœdème de la jambe 6 ans après avoir été diagnostiquée d’un cancer de l’endomètre. Depuis, elle est devenue patiente experte et met ses connaissances sur la maladie au service d’autres. Retrouvez son témoignage dans notre podcast Osons la vie.
Peut-on prévenir un lymphœdème ?
On l’a vu, la majorité des facteurs de risque de survenue d’un lymphœdème ne sont pas maîtrisables puisqu’ils sont essentiellement liés aux traitements.
Contrairement aux idées reçues, vous ne pourrez donc pas vous en protéger en évitant de porter des charges lourdes, de faire du sport, de prendre des bains chauds ou encore les prises de sang ou de pression artérielle.
Comme le souligne le Dr Stéphane Vignes, chef de l’Unité de Lymphologie de l’hôpital Cognacq-Jay (Paris) et président de la Société Française de Lymphologie, le message à retenir est le suivant : “Si vous développez un lymphœdème, ne culpabilisez pas, vous n’y êtes pour rien.”

À LIRE AUSSI : “Il faut arrêter le sport”, “Les massages peuvent le faire disparaître, »… beaucoup d’idées reçues circulent sur le lymphœdème. On a démêlé le vrai du faux.
Quels sont les premiers signes d’un lymphœdème ?
Les signes qui doivent alerter sont :
- une sensation de lourdeur au niveau du membre,
- des vêtements ou des bijoux devenus trop serrés. Vous pourriez avoir du mal à enfiler une des manches de votre pull ou un pantalon, par exemple. Vos bracelets et vos bagues pourraient aussi vous sembler plus ajustés que d’habitude.
La douleur n’est en revanche pas un symptôme habituel de lymphœdème. Si l’un de vos membres vous fait souffrir, il s’agit peut-être d’une neuropathie : une atteinte nerveuse consécutive à la chirurgie ou à la chimiothérapie. Parlez-en à votre médecin.
Que faire aux premiers signes de gonflement ?
N’attendez pas ! Consultez rapidement un professionnel de santé qui saura vous orienter.
Vous pouvez vous adresser :
- à l’oncologue ou au radiothérapeute qui assure le suivi de votre cancer.
- au kinésithérapeute qui a pris en charge votre rééducation.
- à un centre de compétence pour les lymphœdèmes primaires. Ces centres sont souvent en mesure de prendre en charge les lymphœdèmes secondaires. Vous trouverez leurs coordonnées sur le site de la FAVA-multi, filière de santé des maladies vasculaires rares à atteintes multisystémiques.
Comment diagnostique-t-on un lymphœdème ?
Cas du lymphœdème du bras
Un lymphœdème du bras est diagnostiqué lorsqu’il y a une différence de 2 centimètres de circonférence entre les deux bras.
Cas du lymphœdème des jambes
Le diagnostic du lymphœdème des membres inférieurs peut être plus complexe à établir, car la maladie touche souvent les deux jambes. Contrairement au lymphœdème du bras, il n’y a donc pas toujours de membre non atteint pouvant servir de référence pour la comparaison des mesures.
Le diagnostic repose alors sur la présence d’un symptôme spécifique du lymphœdème du membre inférieur appelé “signe de Stemmer” : l’impossibilité de pincer la peau sur le dessus ou à la base du 2ème orteil en raison de son épaississement.

Comment réduire le volume d’un lymphœdème ?
Le traitement de référence est appelé physiothérapie décongestive. Il agit sur la composante lymphatique du lymphœdème et permet de réduire entre 30 et 40% de son volume.
Il se déroule en deux temps : une première phase intensive pour réduire le volume du lymphœdème, puis une phase d’entretien pour le maintenir. Dans le cas d’un “petit”2 lymphœdème, le traitement se limitera à la seconde phase.
Phase intensive : la réduction du volume
Pour une prise en charge complète et par une équipe pluridisciplinaire, il est recommandé de réaliser cette phase à l’hôpital, dans une structure spécialisée. Vous y bénéficierez notamment :
- de consultations avec un kinésithérapeute : tous les matins, il réalisera un bandage autour de votre lymphœdème à l’aide de bandes de capitonnage et de bandes dites “peu élastiques”. Vous devrez le porter jour et nuit.
- d’activités physiques adaptées : le fait de contracter les muscles du membre contraint par le bandage favorise le débit lymphatique et contribue à réduire le volume du lymphœdème.
- de consultations avec une diététicienne : le lymphœdème étant en partie constitué de graisse, son volume varie en fonction de votre poids. Il est donc important de le maintenir ou d’en perdre si cela est nécessaire.
- de consultations avec un psychologue qui vous aidera à vous réconcilier avec votre image corporelle.
- d’un programme d’éducation thérapeutique du patient (ETP) qui vous rendra autonome dans la prise en charge de votre lymphœdème, en particulier dans la réalisation des bandages. Cet accompagnement est essentiel pour la seconde phase du traitement.
Cette première phase dure le plus souvent 2 semaines.
UN KINÉ PRÈS DE CHEZ VOUS
Si vous ne pouvez ou ne souhaitez pas être hospitalisé, un kinésithérapeute peut réaliser vos bandages en cabinet. Pour trouver un professionnel formé à cette technique près de chez vous, consultez la carte mise en ligne sur le site de l‘Association des Kinésithérapeutes du Lymphœdème (AKTL).
Phase d’entretien : maintien du volume
Une fois chez vous, l’objectif est de stabiliser la perte de volume obtenue lors de la première phase. Pour cela, il est essentiel de continuer à maintenir le membre comprimé :
- la journée, grâce à des dispositifs de compression élastique : bas, collants, chaussettes pour les jambes, manchons pour les bras. Pour être efficaces, ces dispositifs doivent être confectionnés sur-mesure, c’est pourquoi il est important de s’adresser à un pharmacien orthopédiste ou un orthésiste formé à la prise de mesure.
- la nuit, grâce aux bandages que vous aurez appris à réaliser vous-même lors de la première phase (ou avec l’aide d’un kinésithérapeute).
Cette routine doit être poursuivie tout au long de votre vie pour éviter que le lymphœdème ne regagne du volume.
TUTO BANDAGE
L’hôpital Cognacq-Jay (Paris), Centre de référence national du lymphœdème primaire, a mis en ligne sur sa chaîne YouTube des tutoriels pour apprendre à réaliser les bandages. À destination des patientes et des kinés.
Le lymphœdème peut-il disparaître ?
Malheureusement, le lymphœdème est une maladie chronique. La physiothérapie décongestive peut réduire son volume (de 30 à 40%) mais votre bras ou votre jambe ne retrouvera pas sa taille initiale. C’est pourquoi il est important de réagir dès les premiers signes.
À LIRE AUSSI : Retrouvez nos solutions pour lutter efficacement contre votre lymphoedème au quotidien.
Qu’en est-il des traitements chirurgicaux du lymphœdème ?
Trois gestes chirurgicaux peuvent contribuer à réduire le volume du lymphœdème.
- L’anastomose lymphatico-veineuse vise à connecter un vaisseau lymphatique encore fonctionnel du membre atteint par le lymphœdème à une veine située à proximité. Le but est d’évacuer la lymphe dans la circulation sanguine.
- Le transfert (ou greffe) de ganglions consiste à prélever du tissu sain comprenant des ganglions (le plus souvent provenant du bras, du ventre ou du pli de l’aine) pour le transférer au niveau du lymphœdème. Là encore, l’idée est de restaurer le drainage lymphatique mais cette fois, en remplaçant les ganglions retirés ou endommagés par les traitements.
- La liposuccion, quant à elle, permet de retirer l’excès de graisse du lymphoedème.
“Ces opérations ne permettent toutefois pas de guérir du lymphœdème et n’empêchent pas le port de compressions. La liposuccion nécessite par exemple de porter un manchon jour et nuit, à vie, précise le Dr Vignes. Elles sont par ailleurs peu réalisées en France car il s’agit de chirurgies complexes. L’anastomose demande une expertise en microchirurgie. La liposuccion d’un lymphœdème est techniquement difficile en raison de l’épaisseur de la peau. Enfin, ces chirurgies ont une efficacité variable et peuvent entraîner des effets indésirables majeurs. Le transfert de ganglions peut notamment provoquer un lymphœdème dans la région où les ganglions sains ont été prélevés.”
Il est important de noter que ces interventions peuvent représenter un reste à charge important.
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Quelles sont les complications du lymphœdème ?
La principale complication du lymphœdème est l’érysipèle (aussi appelé dermohypodermite bactérienne non nécrosante ou DHBNN). Il s’agit d’une infection causée par une bactérie de type streptocoque qui s’introduit dans le corps par une blessure : coupure, griffure de chat, piqûre de rosier, piqûre d’insecte…
Les symptômes sont :
- une forte fièvre qui survient brutalement,
- le membre atteint par le lymphœdème qui devient chaud, rouge, douloureux et son volume augmente.
Le traitement consiste à la prise d’antibiotiques pendant 7 jours.
REPLAY : Pour en savoir plus sur le lymphœdème et ses traitements, retrouvez le replay de notre webinaire sur le lymphœdème avec le Dr Stéphane Vignes sur notre chaîne YouTube.
Les traitements contre le lymphœdème sont-ils remboursés par la sécurité sociale ?
Partiellement.
Les dispositifs de compression élastiques
Pour les bas, collants ou manchons, le reste-à-charge est d’environ 50 € pour un bras et 100€ pour une jambe. Bien que vous puissiez les laver, il faudra les remplacer 3 à 4 fois par an car ils perdent de leur efficacité avec l’usure.
Les bandes peu élastiques
Les bandes peu élastiques et le capitonnage ne sont pas remboursées par l’Assurance Maladie. Leur coût dépend de la zone à traiter. Pour un bras par exemple, il faut compter environ 100 €. Certaines mutuelles peuvent toutefois couvrir ce type de « petit matériel médical » au travers de forfaits spécifiques. Renseignez-vous auprès de votre mutuelle pour connaître vos droits.
À LIRE AUSSI : Notre interview du Dr Vignes qui alerte sur le reste-à-charge important que doivent assumer les personnes touchées par un lymphœdème. RoseUp œuvre à son côté pour que ces frais soient pris en charge par la sécurité sociale. Pour soutenir notre action, c’est par ici !
Merci au Dr Vignes, chef de l’Unité de Lymphologie de l’hôpital Cognacq-Jay (Paris) et Président de la Société Française de Lymphologie, pour son aide dans l’écriture de cet article.
1. Dans la suite de cet article, par abus de langage, nous ferons référence au “bras” comme la partie du corps située entre l’épaule et le poignet (contrairement à la définition anatomique qui ne comprend que la partie située entre l’épaule et le coude).
2. Quand la différence de volume entre le membre touché par le lymphœdème et le membre indemne n’excède pas 20%.